Dans l’enquête pour la mort d’un jeune étudiant en 1985, la cour d‘appel de Santiago a décidé de convoquer Sergio Onofre Jarpa, ex-ministre de l’intérieur de Pinochet et son ancien bras droit, l'ex-sous-secrétaire Alberto Cardemil. Les deux anciens collaborateurs de Pinochet ont été interrogés pour leur responsabilité dans la mort du jeune Patricio Manzano, arrêté avec 240 autres étudiants en février 1985 et décédé ensuite dans un commissariat de police.
Cette décision de justice constitue au Chili une véritable nouveauté, car hormis quelques rares anciens militaires responsables d’atrocités sous la dictature, jamais des civils ayant collaboré ouvertement aux exactions n’ont été inquiétés.
Sergio Onofre Jarpa Reyes, l’ancien ministre de Pinochet, est un riche exploitant agricole, prospère entrepreneur et homme politique, fondateur et dirigeant historique de plusieurs formations de la Droite nationale et deux fois sénateur. Vieux renard de la politique, leader du Parti conservateur et sénateur en 1973, Jarpa fut un farouche adversaire au président Salvador Allende, et l’artisan de l’accord politique passé par la Droite avec la Démocratie chrétienne, parti centriste qui avait d'abord soutenu l’arrivée d’Allende à la présidence.
Cette décision de justice constitue au Chili une véritable nouveauté, car hormis quelques rares anciens militaires responsables d’atrocités sous la dictature, jamais des civils ayant collaboré ouvertement aux exactions n’ont été inquiétés.
Sergio Onofre Jarpa Reyes, l’ancien ministre de Pinochet, est un riche exploitant agricole, prospère entrepreneur et homme politique, fondateur et dirigeant historique de plusieurs formations de la Droite nationale et deux fois sénateur. Vieux renard de la politique, leader du Parti conservateur et sénateur en 1973, Jarpa fut un farouche adversaire au président Salvador Allende, et l’artisan de l’accord politique passé par la Droite avec la Démocratie chrétienne, parti centriste qui avait d'abord soutenu l’arrivée d’Allende à la présidence.
De la Droite au Centre, une vaste coalition d’opposition a été ainsi échafaudée, virulente et multiforme, qui forte du solide soutien financier nord-américain a bloqué politiquement l’exécutif et organisé la déstabilisation économique, sans exclure la conspiration ni les appels aux militaires à déposer le gouvernement constitutionnel par la force.
Souteneur et très proche de la dictature suite au sanglant coup d’État de 1973, Sergio Onofre Jarpa a été dès 1974 représentant du Chili aux Nations Unies, puis ambassadeur en Colombie et en Argentine entre 1976 et 1983. Il a été désigné par Pinochet au ministère de l'intérieur en 1983, et il y est resté jusqu’en 1985. Son sous secrétaire d’alors était Alberto Cardemil, avocat de Droite qui avait déjà servi comme fonctionnaire ministériel dans l’appareil administratif de la dictature.
Alberto Cardemil, devenu ensuite porte-parole du régime militaire, apparaît aussi dans d'autres dossiers collaborant très étroitement avec la CNI, la police secrète de Pinochet, et lié à plusieurs opérations contre les opposants de l’époque.
Comme ministre de l'Intérieur —au Chili, le Premier ministre —, Sergio Onofre Jarpa a conduit une séquence d’apparente « ouverture » du régime militaire et de dialogue politique avec l'opposition. Cette prétendue ouverture c’est avéré une manœuvre pour désamorcer la contestation croissante qui gagnait le pays, et notamment pour freiner les « Journées de protestation nationale » lancées en 1983 par l’opposition.
La dictature a sorti les militaires dans la rue contre la population, et la répression a fait plusieurs morts. Les arrestations massives se sont multipliées, les déportations d’opposants ont repris et les appareils secrets de répression politique n’ont pas cessé les enlèvements, ni les tortures ni les assassinats.
En février 1985 la fédération d’étudiants du Chili (Fech) avait organisé comme chaque année sa campagne de « travaux d’été ». En effet, c’est une tradition chez les étudiants chiliens de partir en nombre pendant les vacances d’été dans des lieux reculés du territoire, pour y effectuer bénévolement des tâches agricoles, bâtir des écoles rurales, faire l’alphabétisation, réparer des habitations ou des réseaux d’égouts.
Sous l’état de siège décrété par la dictature, qui craignait toute forme d’organisation citoyenne et surtout les étudiants, ces travaux d’été ont été interdits. Le matin du 8 février 1985, 240 étudiants de plusieurs universités et différentes filières ont été arrêtés sur ordre du ministre de l'Intérieur à 70 km de Santiago. Tabassés par la police, puis exposés à plat ventre au soleil pendant des heures, ils ont été conduits le soir à Santiago et écroués au 1° commissariat des carabiniers.
Patricio Manzano, un des jeunes détenus, élève ingénieur de 21 ans, a été victime d’un très grave malaise respiratoire et il a été tout de suite secouru par des étudiants en médecine emprisonnés avec lui. Les étudiants ont appelé à l’aide, mais les policiers ont traîné les pieds, l’officier a refusé même une voiture de police pour emmener à l’hôpital l’étudiant agonisant. Le jeune est mort dans le commissariat, apparemment d’un arrêt cardiaque, son décès a été constaté dans l’ambulance qui est arrivée tardivement.
Patricio Manzano est venu grossir la très longue liste de victimes mortes pendant l’état d'urgence. La plainte déposée à l’époque par la famille pour arrestation arbitraire et violence injustifiée est restée sans suite, les circonstances de sa mort n’ont pas été élucidées et les responsables sont restés impunis.
Sergio Onofre Jarpa, l’ancien ministre de l’intérieur de Pinochet a été en 1987 cofondateur et puis sénateur de Rénovation Nationale, parti de la droite dure héritière politique de Pinochet, qui a porté Sebastián Piñera au gouvernement en 2010 et a recyclé plusieurs cadres et hauts fonctionnaires ayant collaboré avec la dictature.
En 1994 Jarpa s’est retiré de la vie publique dans sa propriété d’El Totoral, à 240 km au sud de Santiago. Il s'occupe d’agriculture, de sa famille et de sa femme, l'avocate Mina Huerta Dunsmore. L’actuelle compagne de Sergio Onofre Jarpa est une des filles de l’amiral Ismael Huerta, marin putschiste et ex ambassadeur de Pinochet à l’Onu.
Dans les années 70, pendant le gouvernement d’Allende, Mina Huerta Dunsmore a participé aussi de très près aux opérations de déstabilisation de l’ultra droite au sein de la Marine, notamment un « auto attentat » à la bombe en début juillet 1973 contre une maison vide appartenant à son père, l'amiral Huerta.
Dans les années 70, pendant le gouvernement d’Allende, Mina Huerta Dunsmore a participé aussi de très près aux opérations de déstabilisation de l’ultra droite au sein de la Marine, notamment un « auto attentat » à la bombe en début juillet 1973 contre une maison vide appartenant à son père, l'amiral Huerta.
Sergio Onofre Jarpa, entretien à la revue Paula, 3 Mars 2010 |
Exécutés par le groupuscule d’ultra droite « Patrie et liberté » et pilotés par le service d’intelligence de la Marine, ces attentats qui ont ciblé aussi des officiers et des installations navales, visaient à générer un climat de désordre incitant les militaires à prendre le pouvoir. Ils ont débouché le 26 juillet 1973 sur l’assassinat du commandant Arturo Araya Peeters, aide de camp du président Salvador Allende.
Mina Huerta Dunsmore a été aussi récemment la présidente de la « Corporation 11 septembre », association des nostalgiques de Pinochet qui réunit des retraités de l’armée et vise à « défendre le legs historique » du dictateur disparu.
Mina Huerta Dunsmore a été aussi récemment la présidente de la « Corporation 11 septembre », association des nostalgiques de Pinochet qui réunit des retraités de l’armée et vise à « défendre le legs historique » du dictateur disparu.
Cette association ―qui organise des hommages à des militaires criminels―, est très intimement liée aux ex-agents de la DINA-CNI, et la vitrine des revendications des anciens officiers inculpés pour crimes sous la dictature. C’est l'outil médiatique de la « famille militaire », le puissant lobby des anciens collaborateurs de la dictature, qui aux armées et dans la société civile chilienne, cherche à arrêter les poursuites pour violations des droits de l’homme et à faire libérer les rares ex officiers condamnés pour crimes.
Depuis fin 1999, Sergio Onofre Jarpa est l’un des 39 extradables de la liste du juge espagnol Baltasar Garzón, les collaborateurs civils et militaires de la dictature de Pinochet sur lesquels pèse un ordre de capture internationale pour crimes de lèse humanité au Chili.