lundi 16 mars 2015

Meurtre du chanteur chilien Víctor Jara : le juge clôt l’enquête avec 12 inculpés

Víctor Jara, chanteur et dramaturge chilien, folkloriste et professeur à l’université technique de l’état, militant communiste et auteur de chansons célèbres qui font le tour du monde. Son meurtre aux mains de la soldatesque en septembre 1973 a été un acte odieux de revanche politique, et une tentative d’anéantir la culture populaire et l’esprit de révolte qu’il a porté. Víctor avait 40 ans et son œuvre et son image sont aujourd’hui l’emblème des combats pour les droits civiques et des peuples en résistance.
La justice a fermé le 5 mars dernier l'instruction du dossier sur l'assassinat du célèbre chanteur chilien Víctor Jara, et une douzaine de militaires à la retraite ont été inculpés pour leur participation au crime, commis le 16 septembre 1973 au stade « Chili », à Santiago. Parmi eux deux anciens officiers de l’armée sont accusés d’être les auteurs matériels, et l'un d'eux habite en Floride, aux États-Unis.

José Adolfo Paredes Márquez,
ex recrue, a avoué le meurtre.
Cette résolution judiciaire ferme l'investigation sur les meurtres du chanteur Víctor Jara et de l'ex directeur de Gendarmerie Littré Quiroga Carvajal, commis peu de jours après le coup d’État du 11 septembre 1973.
Les 12 anciens militaires inculpés à l’issue de l'enquête sont : José Adolfo Paredes Márquez, Pedro Pablo Barrientos Núñez, Hugo Hernán Sánchez Marmonti, Raúl Aníbal Jofré González, Edwin Armando Roger Dimter Bianchi, Nelson Edgardo Haase Mazzei, Jorge Eduardo Smith Gumucio, Ernesto Luis Bethke Wulf, Juan Jara Quintana, Rolando Humberto Melo Silva, Hernán Chacón Soto et Patricio Vásquez Donoso.
 
Le colonel Hugo Sánchez Marmonti et le lieutenant Pedro Barrientos Núñez, tous deux à la retraite, sont soumis à procès en qualité d’auteurs matériels du crime de Víctor Jara. Pedro Barrientos Núñez, à l’époque lieutenant de l’armée, a été mis en cause en 2012 par l'ex-conscrit José Paredes comme celui qui a tiré dans la tête du chanteur.

Pedro Barrientos réside actuellement aux États-Unis et il a pris la nationalité américaine, et le juge chilien avait sollicité en 2013 son extradition, sans résultat jusqu'à maintenant.
Résident depuis 1989 à Deltona, au nord de Floride, l’ancien lieutenant chilien est accusé aux États-Unis de « torture et de meurtre » de Víctor Jara, commises pendant l’« arrestation massive de milliers d'intellectuels et de leaders politiques ».


Il doit faire face à la plainte judiciaire présentée contre lui devant une cour du district d'Orlando par la veuve du chanteur assassiné, la danseuse Joan Turner et Amanda Jara, sa fille, parties civiles avec le « Center for Justice and Accountability (CJA) », —ONG internationale de défense des droits de l'homme basée à San Francisco—, et la Fondation Víctor Jara. Un bureau d'avocats local représente la famille du musicien et les autres parties civiles.

L'enquête a déterminé qu'après le coup d'État, le chanteur Víctor Jara a été arrêté le 12 septembre 1973 sur son lieu de travail, l'université Technique de l'État, et emmené jusqu'au stade « Chili ».



Rolando Melo Silva, ancien officier et
procureur militaire, avocat du Conseil
de défense de l'État, accusé de recel
dans l’homicide de Víctor Jara.
Ce site avait été converti en centre de détention, sous contrôle de troupes provenant de différentes unités militaires : les régiments « Tejas Verdes » de San Antonio, « Blindés N°2 » de Santiago, le régiment « Esmeralda » d'Antofagasta et le régiment « Maipo », de Valparaiso.

Après son arrestation, Víctor Jara a été reconnu par les militaires postés à l'intérieur du stade « Chili », a été séparé du reste des prisonniers et conduit dans les vestiaires, utilisés comme salles d'interrogatoires et de tortures. Il y a été sauvagement tabassé et torturé par les militaires.

Le 16 septembre 1973 tous les détenus du stade on été transférés, sauf Víctor Jara et Littré Quiroga Carvajal. C’est alors que le chanteur a été tué, vraisemblablement d’une ou plusieurs balles dans la tête. Son cadavre —trouvé près du cimetière Métropolitain des jours après, avec 3 autres cadavres—, présentait au moins 44 impacts de balle, et des signes évidents d'avoir subi des tortures et des coups affreux.

L’ancien stade « Chili », qu’avec d’autres locaux avait été réquisitionné et fonctionné dès les premières heures du coup d’État comme camp de concentration et de tortures pour les prisonniers politiques, a été rebaptisé aujourd’hui stade Víctor Jara.