Lucía Hiriart de Pinochet,
frivole et ambitieuse, a exercé un pouvoir certain aux côtés du dictateur Pinochet, son mari. Fidèle de Manuel
Contreras, le chef de la répression responsable de milliers de morts à la
tête de la DINA,
elle l’a soutenu lorsque Pinochet l’a lâché en 1976. Comme tous les
membres du clan, madame Pinochet s’est abondamment servie dans les
caisses publiques pendant les 17 ans qu’elle a été la « première dame » du
Chili.
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Lucía Hiriart de
Pinochet, 92 ans, la veuve de l’ancien dictateur du Chili Augusto Pinochet, se
retrouve aux côtés d’Imelda Marcos, de Suzanne Moubarak, d’Elena Ceausescu, de
Leila Ben Ali et plusieurs autres femmes de dictateurs dans un film
documentaire diffusé à la télévision française depuis le 20 septembre 2015.
Après cinq ans
d'enquête sur une trentaine de femmes de dictateurs et 2 ans de tournage, le
réalisateur français Joël Soler montre une série documentaire de cinq
chapitres intitulée « Despot Housewives ». En mettant en lumière l’attitude et
les agissements des femmes des tyrans les plus célèbres du XXème siècle, le
réalisateur s'est penché sur une face mal connue des dictatures, le rôle de ces
femmes dans la terreur. Ce dernier travail de Joël Soler continue ses
reportages sur Adolphe Hitler, sur Saddam Hussein et d’un troisième sur Ben Laden.
« Despot Housewives
», diffusée sur la chaîne thématique
française «
Planète » à partir du 20 septembre 2015.
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Soutiens, complices, ou
naïves accompagnatrices, certaines ont participé directement à la répression,
en occupant des fonctions officielles au sein du régime, et d'autres ont joué un rôle plus diffus, mais tout aussi
lourd de conséquences par leur
position de « premières dames ».
Parmi elles Leila Ben
Ali, surnommée « la Régente », dont la famille, décrite comme
une « petite mafia », le clan Trabelsi, avait la main sur la quasi totalité des
investissements en Tunisie, ou encore Imelda Marcos, veuve du dictateur Ferdinand
Marcos, qui aux côtés de son mari a pillé les Philippines pendant
plus de 20 ans.
Toutes ces femmes
rencontrées par Joël Soler citent comme référence Mère Teresa, dont elles
disent avoir voulu imiter l'action. Autre point commun, le sentiment d'être en
paix avec leur conscience. Aucun remord d'avoir participé activement ou soutenu
des dictatures, pas de regrets malgré leur responsabilité pénale ou morale. Certaines
ont également un regard tristement cynique sur leur vie passée et ne cachent
pas regretter ces années où leur vie était facilitée par la terreur qu’elles ou
leurs maris faisaient régner dans leurs pays. Pas plus de culpabilité chez
l'épouse du général Pinochet qui considère son époux comme un héros.
« Pinochet a été mis en place par la CIA, les
Reagan et la Maison-Blanche déroulaient le tapis rouge aux Pinochet, Margaret
Thatcher a dit jusqu'à sa mort que c'est lui qui a amené la démocratie au
Chili. Comment voulez-vous qu'elle voit son mari comme un dictateur ? »
Joël Soler
Lucía Hiriart fut
l’épouse d’Augusto Pinochet, le général qui pendant 17 ans a exercé le
pouvoir par la terreur au Chili : 3 200 morts et disparus documentés sous sa
dictature, et plus de 38 000 torturés entre 1973 à 1990.
Cassante et implacable,
arbitraire et très peu compatissante avec les victimes de la dictature, madame Pinochet
est connue aussi par sa frivolité, son goût pour les chapeaux et des vêtements
de marque, ainsi que les décors surchargés dans ses nombreuses demeures.
Empêchée elle-même de
se déplacer à l’étranger —vue la possibilité de se faire arrêter aux frontières
en raison des enquêtes visant dans plusieurs pays l’entourage du dictateur—
madame Pinochet avait l’habitude de commander de la haute couture et des
accessoires dans les principales villes d’Europe, et ses coûteuses acquisitions
étaient ensuite expédiées par les valises diplomatiques depuis les différentes ambassades
chiliennes. Sa collection de bijoux a augmenté aussi considérablement sous le
règne de son mari, et elle avait un maquilleur, un coiffeur et un photographe
personnel.
Pendant la période où
la Junte militaire a eu son siège dans le bâtiment « Diego Portales », de 1973
à 1981, Lucía Hiriart était installée au 17ème étage, assistée d’un
staff de vingt personnes. Elle était alors à la tête de CEMA Chili, un vaste
réseau associatif de femmes bénévoles s’occupant d’œuvres de bienfaisance pour
les nécessiteux, et qui gérait aussi plusieurs points de vente d’artisanat au
Chili. Des subventions et divers ressources alloués au réseau ont été systématiquement
détournés et ont finalement atterri dans les poches de Lucía Hiriart et ses
proches, comme l’ont établi des enquêtes postérieures.
En 2005, dans le cadre
du « dossier Riggs », le Trésor publique chilien a porté plainte contre madame
Pinochet pour complicité d'évasion fiscale pour un montant de 2,35 millions de
dollars, et elle a été en prison préventive pendant une journée, mais le tribunal a
abandonné les charges en janvier 2007.
Le 4 octobre 2007, un
juge spécial a prononcé la mise en examen et l’arrestation de Mme Lucía
Hiriart, de ses cinq enfants et 17 autres personnes, pour détournement de fonds
publics. Opportunément admise à l’hôpital militaire pour une soudaine affection
la veuve du dictateur a échappé encore à la prison.
Aujourd’hui, les
anciennes loyautés du temps de la dictature militaire se sont considérablement
distendues et la droite chilienne s'est clairement démarquée de la famille Pinochet.
Seuls ses enfants et un réduit noyau d’irréductibles, anciens gradés ultra
fanatiques de l’ancien dictateur rendent visite à la veuve, qui n’a plus de
suite ni staff, et traîne seule dans sa luxueuse maison de trois mille mètres
carrés, dans l'un des quartiers les plus chers du Chili. Mme Lucía Hiriart et
le clan Pinochet espèrent récupérer les 25 propriétés qui leur ont été saisies
dans les différents dossiers fiscaux et juridiques instruits contre eux. Mais
même si ce n’est pas le cas, cette famille et ses héritiers ne vivront jamais
dans la pauvreté.