mercredi 16 avril 2014

Le Président Evo Morales a remis à La Haye la demande bolivienne d’accès à la mer

Le Président Evo Morales, chef de file du « Mouvement vers le socialisme » (MAS) et ancien dirigeant syndical d’origine Aymara, ethnie majoritaire de l'Altiplano bolivien. Proche d’une vision anti libérale pour l'Amérique latine, Evo Morales a été réélu pour un second mandat avec une confortable majorité, malgré les nombreux obstacles et l’opposition farouche de l’oligarchie locale. Porteur affiché des revendications sociales et culturelles des populations indigènes de la Bolivie, il exprime aussi la forte exigence nationale de récupérer un accès légitime à la mer.
Mi-avril 2014, le président bolivien Evo Morales était à La Haye (Pays-Bas), où il a remis à la Cour internationale de Justice (CIJ) la demande de son pays en vue d'obtenir un accès souverain à l'océan Pacifique, un accès dont la Bolivie est privée depuis la fin du XIXème siècle.
La Cour internationale de Justice,
l’organe judiciaire de l’ONU depuis
avril 1946. Composée de 15 juges
élus, elle règle conformément au
droit international les différends
d’ordre juridique qui lui sont
soumis par les États.


Le président Evo Morales avait souhaité que la Cour de justice internationale de La Haye se prononce sur sa demande d'accès à la mer avec « la même équité » que celle ayant motivé son arbitrage dans le différend entre le Chili et le Pérou.

Les frontières après la guerre du Pacifique
qui opposa le Chili au Pérou et à la Bolivie
entre 1879 et 1883. La Bolivie a perdu sa
province du Littoral, son seul accès à la mer.
Le Pérou a perdu Tarapacá et Arica.
Depuis la fin du conflit ces territoires
appartiennent au Chili.

Fin janvier 2014, la Cour a résolu une importante question en suspens, en reconnaissant au Pérou ses droits et en établissant une nouvelle frontière maritime avec le Chili.

 La CIJ mettait ainsi fin à une dispute territoriale séculaire entre le Pérou et le Chili, avec l'attribution au Pérou d'une zone maritime riche en ressources piscicoles, qui se trouvait sous souveraineté chilienne depuis la guerre du Pacifique,  appelée aussi « guerre du salpêtre » (1879-1884).

À l'issue du conflit, les boliviens avaient perdu leur façade océanique et l’accès au Pacifique au profit du Chili, causant un manque à gagner considérable à la Bolivie, un des pays les plus pauvres d'Amérique du Sud et aujourd’hui exportateur de matières premières. 

Après de nombreuses tentatives de négociations infructueuses avec Santiago, La Paz avait déposé une plainte devant la CIJ pour tenter de récupérer son « retour à la mer », aspiration nationale inscrite dans la Constitution bolivienne et enjeu clé pour le président socialiste Evo Morales.

Corvée d’enterrement des morts boliviens par des soldats chiliens après la bataille de Tacna, en mai 1880. Ce combat marqua la défaite militaire des troupes boliviennes, très inférieures en hommes et en moyens, et le retrait de la Bolivie du conflit. Photo Diaz & Spencer, journal « El nuevo ferrocarril », Santiago, 1880.

C’est la première fois qu’un président se rend personnellement devant cette instance internationale avec une requête concernant son pays. Et c’est le signe de l’importance de cette démarche pour la Bolivie et son président Evo Morales, résolus à obtenir par le droit international ce que la force et les intérêts étrangers ont arraché à son pays il y a 135 ans.

Hissement du drapeau chilien sur la « Colline d’Arica », coteau côtier et dernier rempart des troupes péruviennes, écrasées le 7 juin 1880 par l'armée chilienne après des sanglants combats. Ancienne localité du sud du Pérou, Arica est passée sous contrôle chilien depuis la guerre du Pacifique, puis annexé en 1929 par le Chili, qui en a fait sa ville limitrophe du Nord, fort bastion économique et militaire.

Malgré la réticence historique du Chili à négocier, l’équilibre locale et la stabilité dans une région en forte croissance, et les exigences supérieures de l’intégration latino-américaine passent nécessairement aujourd’hui par le règlement rapide et équitable de ce long différend, vieux de plus d’un siècle.

mardi 8 avril 2014

Adriana Rivas : mobilisation citoyenne pour dénoncer une criminelle chilienne en Australie

Les premières manifestations devant le Parlement australien à Melbourne, le 4 avril 2014. D’autres mobilisations demandant l'extradition de la tortionnaire Adriana Rivas ont eu lieu ensuite à Sydney et d’autres villes australiennes.
Adriana Rivas, citée dans plusieurs enquêtes
pour tortures, assassinats et disparitions de
personnes, en fuite de la justice chilienne
depuis 2010.
Une grande manifestation pacifique a été convoquée devant le Parlement à Melbourne pour dénoncer une ancienne criminelle chilienne installée en Australie. Les manifestants ont lancé une vaste campagne de sensibilisation et une pétition pour que Adriana Elcira Rivas González, ex sous-officier de l’armée chilienne à la retraite et ancienne membre de la redoutable DINA, soit renvoyée au Chili pour faire face à ses juges.

Adriana Rivas est accusée de participation directe à des enlèvements aggravés, d’application de tortures et de la disparition de personnes au Chili. Lors d’un entretien en 2013 à la chaîne australienne SBS, elle avait reconnu les tortures infligées par les appareils de sécurité chilienne à des milliers de prisonniers, et en a même justifié sa pratique systématique dans le but de « briser les personnes ».

Suite à la diffusion de son entretien et aux avancées du dossier au Chili,
en janvier 2014 un juge avait demandé à l’Australie l’extradition d’Adriana Rivas. L’ex agente de la DINA de Pinochet habite la banlieue sud de Sydney, et plusieurs médias locaux suivent maintenant le déroulement de la procédure, longue et complexe.

Manuel Contreras, colonel et chef de la DINA
avec Adriana Rivas en 1975. À la Tv SBS l’ex
tortionnaire a appelé cette période « la plus
belle de sa vie ».

Comme l’a rapporté récemment la chaine ABC News, l’ex agente Adriana Rivas, très proche du général Manuel Contreras et membre de la brigade « Lautaro », l’unité secrète d’extermination, est responsable de crimes contre l'humanité et a été formellement mise en cause par les aveux de Jorgelino Vergara, autre ancien agent qui a brisé le pacte de silence qui lie les anciens tortionnaires.

Installée depuis 1978
en Australie, Adriana Rivas se rendait régulièrement en visite au Chili, et avait été arrêtée en 2006 à Santiago pour son rôle dans le dossier dit « Rue Conferencia », qui concerne la disparition d’une vingtaine de personnes en 1976. Détenue quelques mois, puis mise en liberté avec l'interdiction de quitter le pays, l’ex tortionnaire a fui le Chili en 2010 et a regagné ensuite l’Australie.

Jorgelino Vergara, ancien valet personnel de Manuel Contreras et ex agent de la DINA. Son témoignage a permis d’éclairer des nombreux dossiers des droits de l’homme en souffrance. Image chaîne ABC News, Australie.

Lancée à Melbourne par des associations d’anciens exilés chiliens et soutenue par plusieurs groupes et personnalités de diverses convictions politiques, la manifestation a été relayée dans différentes villes australiennes par d’autres mobilisations analogues, visant à exiger l'accélération de la procédure d’extradition d’Adriana Rivas, et qu’elle soit enfin traduite en justice au Chili.